Cendrillon, le prince et la pantoufle

À travers ses grandes évolutions historiques, le conte de Cendrillon raconte la capture antique des femmes dans un système d’appropriation patriarcal, mais aussi la perte du lien à la Terre. Bien plus tard, le récit dévoilera une compétition entre individus, arbitrée par la métrique transparente de l’argent, sous le signe du Capital naissant. Spoiler : ils eurent beaucoup d’enfants.

Les prétendantes ©Martin_Collette on Foma100

Cette réflexion s’appuie sur le travail de la mythologue Anna Barbara Rooth, qui retrace l’histoire du conte de Cendrillon à partir de la distribution géographique de ses variantes. Julien d’Huy en donne un bref résumé dans un ouvrage récent : Cosmogonies. Il fait passer la généalogie du conte par quatre grandes étapes, qui se sont succédé au cours des quatre derniers millénaires.

Ces quatre versions, présentées schématiquement ci-après, sont évidemment le fruit d’une simplification opérée parmi des centaines de variantes. Néanmoins, les grandes stases dépeintes sont révélatrices de mutations majeures qui eurent lieu dans la haute Antiquité, mais aussi d’évolutions plus récentes. Ce sont ces grandes articulations que je vais tenter de dégager.

Table des matières

Les grands moments du mythe

Selon Julien d’Huy, « le mythe peut être défini comme l’ensemble des traits d’un récit qui résistent à la dissolution et à la réorganisation de leur structure »[1]. Mais justement, cette structure ne se maintient pas sans de constants réaménagements, des épurations et reconfigurations successives, et la production d’excroissances nouvelles. C’est ce que raconte l’histoire du conte. Je reprendrai, presque mot pour mot, le résumé que fait Julien d’Huy[2] de la recherche d’Anna Barbara Rooth[3]. Les indications chiffrées entre parenthèses dénombrent les ajouts (nombres) et variantes (lettres).

A. Le récit d’origine remonterait à 4000 ans environ, au Proche-Orient. Les éléments du mythe sont les suivants : (1) un frère et une sœur sont orphelins de mère ; (2) ils sont nourris par une vache, qui est tuée par leur marâtre ; (3) les os de la vache sont alors enterrés et à cet endroit pousse un arbre nourricier.

B. Le mythe aurait alors évolué pour intégrer les modifications suivantes : (1B) c’est désormais une fille seule, orpheline de mère, qui (2B) garde une vache nourricière tandis qu’elle accomplit des tâches de filage ; (3) sur le corps de l’animal pousse un arbre ; mais (4) seul le prince qui épousera la jeune fille pourra en cueillir les fruits.

C. Il y a 2 500 ans, dans les Balkans, serait apparue une nouvelle version : la vache est toujours le nœud du récit ; mais cette fois, (3B) ce sont des habits magnifiques qui apparaissent là où l’animal est inhumé ; (4B) donnant la possibilité à l’héroïne de se rendre à la fête du prince, où elle perd une pantoufle. (5) « Une fausse fiancée parvient, par ruse, à chausser cette dernière, mais elle est démasquée par un animal. Le prince peut alors se marier avec la bonne demoiselle. »

D. « Le conte aurait ensuite migré à travers l’Europe de l’Est vers la Scandinavie, qu’il aurait atteinte vers l’an mille ». À ce moment serait apparue notre Cendrillon moderne, qui n’a guère évolué. Presque rien ne subsiste de la première partie du récit : l’histoire est celle (2C) d’une jeune fille vivant dans les cendres qui affronte une marâtre et ses filles et séduit un prince. (3C) En lieu et place de la vache nourricière, c’est une fée protectrice qui fait apparaître des vêtements magnifiques et des pantoufles de vair (ou de verre). (5B) Le vair étant la fourrure de l’écureuil, celui-ci joue indirectement le rôle d’animal révélateur, que l’on trouvait dans la version précédente.

À l’origine : la résistance du refoulé terrien

Un élément fondateur et permanent du mythe est la figure de la marâtre. La marâtre est une « anti-mère », dont le lien à l’enfant ne vaut que par le truchement du père. En tant que candidate maternelle de substitution, son signifiant est en échec. Elle apparaît davantage comme un proxy féminin d’une autorité paternelle maintenue à distance par le conte. Cette dissonance teinte profondément le récit. Dans la matrice initiale, la différence sexuelle est par ailleurs peu marquée, puisque l’histoire est centrée sur un duo frère-sœur, et non sur une jeune fille seule.

« La marâtre est avant tout une « anti-mère », dont le lien à l’enfant ne vaut que par le truchement du père. Candidate maternelle de substitution, elle apparaît davantage en proxy féminin d’une autorité paternelle maintenue à distance par le conte.

En contrepoint de cette « fausse mère » d’essence paternelle, c’est une autre filiation qui s’exprime ici, à travers la chaîne mère-vache laitière-arbre nourricier. Cette série transitive, qui séquence la trame narrative du mythe, nous conduit à envisager à nouveau une (af)filiation très ancienne (mésolithique ?), qui précède ou concurrence la patrilinéarité, qui dominera peu à peu dans les États naissants. Cette filiation alternative, dramatisée par le conte, relie l’enfant à la mère et, in fine, à la Terre. La translation de la mère à la Terre est opérée dans le conte en deux temps : d’abord par la vache laitière, léguée par la défunte à ses enfants, et dont la symbolique de fertilité est bien connue dans le monde méditerranéen ; ensuite par l’arbre nourricier, qui pousse dans l’humus, sur la dépouille de la bête.

Cette filiation terrienne alternative, qui résiste au pouvoir du père, nous l’avons étudiée dans le contexte de la Grèce archaïque et du théâtre tragique (Lire : Venir de Terre, l’autre généalogie des Grec-ques). C’est, à proprement parler, une Gé-néologie (car il y va de la capacité créatrice de « Gé », la Terre). Il s’agit moins d’une matrilinéarité que d’une matri-circularité. En effet, ce lignage géo-maternel manifeste avant tout une puissance de renouveler la vie sur les restes des morts. Sa nature, son milieu, est non seulement humain, mais humique (Lire : Désanthropiser, réhumaniser).

« La filiation maternelle résiste à l’empire lointain du père et de l’épouse de remplacement. C’est un défi lancé à l’organisation patriarcale, qui voudrait que la mère soit réduite à un simple substrat de reproduction, comme la nature doit être un support de production.

On ne peut s’empêcher de relier cette concurrence de filiations avec les bouleversements qui accompagnèrent l’émergence de l’État néolithique. Dans le conte, la filiation maternelle-terrienne, portée par les bêtes, les plantes et la glèbe, résiste à l’empire lointain du père et de l’épouse de remplacement. C’est un défi lancé à l’organisation patriarcale, qui voudrait, en son fond, que la mère soit réduite à un simple substrat passif de reproduction, tout comme la terre doit être un support de la domination sur la production.

Or, la vache, c’est l’unité d’une richesse mobile par excellence, appropriable par le roi ou le maître. Le fait qu’elle soit le pivot de cette version initiale, à travers sa destruction par la marâtre et sa résurrection dans un arbre nourricier, condense un enjeu historique immense. Ce qui se joue, c’est l’appropriation des puissances vitales par le pouvoir central du père et de l’État.

Mais la vieille Terre résiste encore. Derrière l’opposition de la mère et la marâtre, c’est la Terre et le Père qui s’affrontent à distance. Le combat des anciennes divinités terriennes et des nouveaux dieux célestes et guerriers de la Cité. Quand elle est soustraite au patrimoine des enfants pour leur être restituée dans un « matrimoine » terrien, c’est le triomphe de l’humanité terrienne (humus) sur le pouvoir anthropique (anthropos) qui se rêve encore[4].

« Derrière l’opposition de la mère et de la marâtre, c’est la Terre et le Père qui s’affrontent à distance (…) Nous sommes à un moment où la naissance des États et la capture des puissances de fertilité par l’organisation patriarcale n’est pas encore vécue comme irréversible dans l’imagination populaire.

Ainsi, le conte conjure l’émergence fatale du pouvoir. Nous sommes à un moment où la naissance des États et la capture des puissances de fertilité par l’organisation patriarcale n’est pas encore vécue comme irréversible dans l’imagination populaire.

Purification antique : la féminité capturée

(a)  Assignation de la féminité et capture de la fertilité

Dans la première phase d’évolution du mythe archaïque, plusieurs innovations significatives se font jour. Tout d’abord, la protagoniste est désormais une jeune fille seule (modif.1B). Cette féminisation est complétée par une caractérisation très sociale, puisque l’héroïne est assignée à des tâches typifiées : elle garde une vache et s’occupe en filant (modif.2B). Son identité de genre s’inscrit donc dans des coordonnées de genre qui se sont nettement cristallisées.

La tâche de garder le bétail modifie profondément le lien qui unit la fille à la vache. Cette opération de surveillance suppose que l’animal n’est plus une émanation de la mère, mais la propriété du père ou d’un maître de l’héroïne. La société s’organise désormais suivant une hiérarchie qui va du roi au peuple, de l’homme à la bête, du masculin au féminin, et du Ciel à ma Terre. Dans cette cascade à sens unique, la femme occupe le rang immédiatement supérieur à l’animal : elle le surveille et elle en file la laine (c’est-à-dire qu’elle linéarise ou civilise sa toison), au service du maître. Cependant, la garde du bétail permet encore la flânerie et la rêverie, alors on y ajoute le filage, qui demande une occupation constante des mains et de l’attention, de sorte que la fille se trouve symboliquement et réellement entravée par sa tâche.

« Le conte cesse de restaurer le lien à la puissance fertile de la Terre, d’où proviennent la vache et l’héroïne, pour instaurer une fertilité dominée, par lequel la vache et l’héroïne produiront la richesse et la postérité royales.

Dans ce contexte, l’ajout de la figure d’un prince, détenteur d’un droit exclusif sur les fruits de l’arbre (add. 4), prend tout son sens : il renverse la perspective. Le conte cesse de restaurer plus le lien à la puissance fertile de la Terre, d’où proviennent la vache et l’héroïne, pour instaurer une fertilité dominée par le Père, par laquelle la vache et l’héroïne produisent la richesse et la postérité royales. Accessoirement, on devine sans peine que ce droit royal porte aussi bien sur les fruits de la fécondation de la jeune fille elle-même.

La résistance de l’ancien lignage terrien fait place à la dominance de la lignée royale. Cette fois, la structure du récit entérine la capture des femmes et de leur descendance par la patrilinéarité. L’héroïne ne se détache du père que pour rejoindre l’époux. Nous passons d’une logique de don, renvoyant à la Terre, à une logique d’échange, renvoyant à la richesse. Les femmes, comme les bêtes, sont des biens mobiles. Au passage, la vache devient une dot.

Tandis que la première version du mythe retenait la mémoire d’une filiation à la Terre par un flux de lait nourricier, la seconde rattache la fille à une lignée royale, par le flux du sang et des richesses. Nous passons d’une conjuration populaire terrienne à un imaginaire sous influence, qui place le socius sous la coupe royale[5].

(b)  La compétition des prétendantes

Dans la troisième étape, située dans les Balkans vers le Vème siècle avant J-C, quelques changements mineurs confirment le tournant pris précédemment. Nous nous rapprochons d’un paysage connu : celui de la Grèce à la fin de l’époque archaïque, au moment où Zeus et ses Olympiens, ceux d’en haut, prennent l’ascendant sur les forces d’en bas, les divinités chthoniennes, dans les récits mythologiques. C’est bien de ce double mouvement dont il est ici question : la focalisation sur le pouvoir royal masculin d’une part ; l’éloignement de la puissance terrienne d’autre part.

Or, chacun sait combien les récits de capture de femmes marquent la naissance de la littérature homérique, où le filage joue d’ailleurs un rôle dans l’assignation domestique de la femme, ainsi que le montre le personnage de Pénélope. Ce thème de la capture et du butin vient corroborer la lecture faite ci-dessus, mettant en évidence un vaste mouvement d’appropriation et de domination de la nature et des femmes, qui passe notamment par une patrilinéarité renforcée.

Pas étonnant, dès lors, que le cœur du drame se décale du meurtre de la vache vers la compétition entre des femmes pour accéder aux faveurs du prince. Cet élément surdétermine l’enjeu, achevant de mettre le conte en orbite autour de la figure sociale du mari royal.

À cet égard, un élément nouveau prend tout son sens. En produisant des parures magnifiques plutôt que des fruits, le corps de la vache fait basculer le récit de la logique du don terrien vers celle du statut social. L’habit, c’est l’avènement du « symbole », supposé isoler la culture de la nature. À noter, enfin, le rôle d’un animal révélateur, qui arbitrera la compétition entre les prétendantes du prince. Ici, il faut peut-être déceler l’émergence d’une logique héraldique, qui associe des figures animales à des maisons royales ou féodales.

Modernisation : les pantoufles du capitaliste

La quatrième phase de l’évolution du récit nous emmène en Scandinavie, puis en Europe occidentale, entre l’an mil et l’époque contemporaine. Selon d’Huy, c’est au Moyen-Âge que serait apparue « notre Cendrillon actuelle ». Le trait le plus saillant de cette évolution est la disparition pure et simple de la vache maternelle. Si la marâtre subsiste, flanquée de ses filles malfaisantes, c’est pour maintenir un trait misogyne et entretenir une compétition féminine qui met en relief la candeur et la pureté de la jeune héroïne.

À première vue, il n’y a rien de plus. Il semble que le conte gravite tout entier autour de la fonction royale et de la compétition entre les prétendantes. Néanmoins, on sent poindre l’émergence d’un nouvel ordre, qui ne se résout pas entièrement à la logique royale ou féodale. C’est ce que semblent indiquer le motif de la compétition d’une part, et certains détails plus récents associés à la chaussure de Cendrillon, d’autre part.

L’autonomisation de la logique compétitive, désormais déliée de tout lien au bétail et aux fruits de la terre, évoque une logique capitaliste qui se met progressivement en place au sortir du Moyen-Âge. D’ailleurs, on note la passivité du prince dans le dénouement de l’intrigue, ce qui nous amène au second élément de la mutation moderne du mythe.

C’est par le biais de la chaussure que s’opère la séparation du bon grain et de l’ivraie. Or, c’est précisément au tournant de la modernité que la pantoufle de Cendrillon acquiert la particularité d’être taillée dans le verre ou le cristal. Ce glissement s’est sans doute produit à la faveur de l’homophonie entre « vair » et « verre ». Il apparaît dans une variante du conte de Perrault[6], datée de la fin du XVIIème siècle et reprise plus tard par Disney.

« La chaussure, absolument transparente et individualisante, devient littéralement l’élément porteur de l’avènement d’une subjectivité triomphante dans un univers de compétition.

Le verre, et surtout le cristal, est un matériau qui se singularise par un aspect brillant et transparent, et qui peut être précieux ou au moins valorisé. Ces qualités en font un analogue possible de la monnaie. La transparence, en particulier, est une caractéristique des flux financiers, qui convertissent la richesse en donnée purement numéraire. Cet élément est encore renforcé par la fonction métrique du soulier, dont le matériau rigide et cassant fait un instrument de mesure implacable de la « valeur » du pied.

La chaussure, transparente et absolument individualisante, devient l’élément porteur de l’avènement d’une subjectivité triomphante dans un univers de compétition. Cela m’a d’ailleurs toujours étonné qu’elle résiste à la malédiction de minuit. Cette incohérence suggère que ce nouvel élément de mesure de la valeur individuelle, analogue du capital financier, est en train d’échapper à toutes les coordonnées d’un récit encore teinté de magie et de lois sociale anciennes. Nous avons affaire à une force indifférente et brute, qui mesure la valeur des individus et établit un nouvel ordre social. Le Capital s’avance, à pas cristallins.

« En passant du vair au verre, le pied de Cendrillon est définitivement sorti de l’humus forestier où poussait l’arbre initial, pour se trouver prisonnier d’un contenant transparent, offrant un contrôle optique et métrique au pouvoir.

Outre qu’il permet de démasquer les fausses prétendantes, le passage du vair au verre exprimerait chez Perrault la délicatesse et la pureté de Cendrillon. Il finit donc d’entériner symboliquement la fragilité de la femme. Ce changement de composition matérielle est d’autant plus signifiant qu’il serait basé sur une association de sonorités fortuites. Il témoigne inconsciemment d’une série de transformations en cours ou en gestation dans le corpus socioéconomique. Outre la disparition de l’animal comme dernier lien à un monde vivant, il indique aussi la perte du lien tactile (la fourrure se plie et se caresse) au profit d’une distance purement spéculaire, qui installe le pouvoir panoptique de l’État ou du prince. Le pied de Cendrillon est définitivement sorti de l’humus forestier où poussait l’arbre initial, pour se trouver prisonnier d’un contenant transparent, offrant un contrôle optique et métrique à l’œil du pouvoir.

Dans la fondation protestante du capitalisme, dépeinte par Weber, l’enrichissement personnel du détenteur du capital devient l’indicateur d’une faveur divine. La valeur de l’individu ne dépend pas de ses actes mais de la grâce de Dieu, et la fructification de son capital en est l’indice ici-bas. On peut alors hasarder un sens pour une autre curiosité non élucidée du conte : la désignation de la chaussure comme « pantoufle ». En effet, à l’époque de Perrault, la pantoufle avait déjà son sens actuel de chaussure d’intérieur confortable. Donc, la promotion sociale de Cendrillon s’obtient par un élément vestimentaire qui se porte en-dehors de toute activité laborieuse. La pantoufle devient le signifiant d’une logique d’accroissement du capital, en même temps que de l’oisiveté des classes supérieures. Et la conclusion traditionnelle – « ils eurent beaucoup d’enfants » – s’entend dans le contexte d’une nouvelle donne capitaliste, dans laquelle l’argent « fait des petits ». Bien que le prince demeure une figure éminente, on assiste au déplacement de la valeur sociale du prestige nobiliaire à la prospérité économique.

Rappelons-nous que ce récit avait commencé avec une vache, enjeu d’une prise de pouvoir sur la fertilité et la productivité de la terre et des femmes. La bête était déjà l’unité d’une richesse mobile (capita désigne en latin la tête de bétail). La boucle est bouclée.


Accessoirement, et dans les limites de sa validité, cette réflexion nous rappelle que les changements d’époque ne sont pas des coupures nettes et des bascules irréversibles, mais consistent en de longues plages de recouvrement. Pendant des siècles, l’avènement de l’État et de son pouvoir royal centralisé est en lutte avec un motif plus ancien, qui rappelle sans cesse la force d’une appartenance terrienne de la (re)production. Le récit populaire est d’abord cette résistance. Plus tard, quand l’élément terrien semble enfin s’effacer complètement, le signifiant despotique est déjà concurrencé par un nouveau genre de pouvoir : celui du capital. Cette rétention prolongée d’une époque dans une autre ne peut être un simple accident. Et il explique que nous n’ayons jamais la conscience certaine de l’époque à laquelle nous appartenons. C’est dans cette incertitude que peuvent s’engager des luttes qui espèrent infléchir le cours de l’histoire. Et la fin de cette histoire-là n’est jamais connue.


[1] D’HUY J, Cosmogonies. La préhistoire des mythes. La Découverte, 2020, p.136.
[2] Ibid., pp.136-137.
[3] ROOTH A B, Tradition areas in Eurasia, in DUNDES A, Cinderella : a folklore casebook, 1982.
[4] L’arbre, c’est la semence retournée contre le Ciel, depuis l’obscur imbroglio terrien où l’arbre projette ses racines tentaculaires. Sa puissance phallique ne permet pas de séparer le masculin du féminin selon une hiérarchie de genres. Autrement dit, la puissance de l’arbre et sa symbolique phallique ne peuvent être dissociées de son substrat terrien. L’histoire de la civilisation est celle de l’arrachement du symbole phallique à la terre, pour relocaliser le pouvoir dans la … patriarcale.
[5] Il y a une « déterritorialisation » et une « reterritorialisation » de la filiation sur la fonction royale. Cf. DELEUZE G et GUATTARI F. L’Anti-Œdipe. Capitalisme et schizophrénie. Dans ce livre, les auteurs décrivent les trois grandes étapes du socius, qui est d’abord terrien, puis despotique, et enfin capitaliste. À chaque fois, les représentations sociales se déterritorialisent et se reterritorialisent (une première fois sur le despote, une seconde sur le capital).
[6] Cf. https://fr.wikipedia.org/wiki/Controverse_sur_la_composition_des_pantoufles_de_Cendrillon