Tenue de soirée : humiliations en cascade

(Re)voir « Tenue de soirée » en 2023 est une expérience troublante. Qui interroge sur la manière dont on aborde la place du genre et du désir dans le corps social. Cascade d’humiliations jouissives, quête de liberté sans issue, où jamais ne s’impose la question piégeuse de ce qui est subi ou choisi, le film est à la fois impossible à regarder aujourd’hui, et plus que jamais nécessaire.

Afficher la douleur . Photo : ©M_Collette on Fuji C200.

HORS PISTE – FICHE CINÉMA

En première analyse, « Tenue de soirée » semble une formidable entreprise de déconstruction de la société bourgeoise et de ses « role models ». Mari, épouse, riche, pauvre, honnêtes gens et malfrats y voient leurs contours s’évanouir et leurs places échangées, dans un tourbillon qui ne cesse de s’accélérer et emporte tout sur son passage.

Pourtant, on devine dès les premières minutes que le film a dû traverser un long purgatoire au cours des dernières années. C’est que les femmes en prennent plein la gueule. Littéralement. Et ce, dès la scène initiale, dont le comique réside dans une gigantesque baffe appliquée par Bob (Depardieu) à Monique (Miou-Miou). En rire nous emplit de culpabilité, aujourd’hui plus que jamais. C’est pourtant là que réside l’essentiel : tout le monde en prend plein la gueule. Et plein le cul. Dans une scène inattendue, Monique pique une colère contre Antoine (Michel Blanc), estimant qu’il pourrait bien consentir un petit effort (comprenez : accepter de se faire sodomiser par Bob). Après tout, elle-même ne cesse de subir ce sort humiliant. « Oui, mais pour les femmes, ce n’est pas pareil », tente Antoine. L’argument est balayé. Tous et toutes baisé-es.

S’en prendre plein la gueule, c’est précisément jouer le « rôle féminin ». Dans la fiction comme dans la vie. C’est ce que montre le film sous toutes les coutures et tous les angles. Comme un porno des âmes…

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Auteur : symbiosphere

Biologiste et historien de la philosophie belge d’ascendance celte. Né en même temps que la crise pétrolière. Se revendique du courant alterdarwiniste et de la théologie des puissances intermédiaires confuses. Herboriste néopaïen, confesse une croyance à faible intensité en un Dieu unique et croit encore moins en l’Homme, mais bien à la multitudes des interactions et des esprits qui criculent entre la croûte terrestre et la voûte céleste, ainsi qu’aux chants et prières qui les flattent ou les agacent. Libéral pour les pauvres et socialiste pour les riches, juste pour rééquilibrer. Lance en 2016 une réflexion symbiopolitique en vue de renouer des alliances entre les populations humaines, végétales, animales et microbiennes contre la menace des biorobots et l’impérialisme technoreligieux de l’Occident capitaliste. M.L. : « Tout ce qui précède est vrai sauf ma nationalité, car la Belgique n’existe plus assez pour me nationaliser. »

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