Comment est né « Symbiosphère »

Récemment, un spécialiste bien intentionné a posté sur un réseau la photo d’une belle forêt naturelle mélangée, prise du ciel à l’aide d’un drone. Il l’a accompagnée du commentaire : « Pour moi, une forêt, c’est ça… ». En lisant cette évocation de l’origine de notre blog, vous comprendrez pourquoi, dans la symbiosphère, une forêt ne peut pas être « ça ».

Un souvenir de Max Lower. Octobre 2024.

« En abordant mon master en Biologie et Écologie, il y a une dizaine d’années, j’ai réalisé que les sciences de la vie ne répondraient jamais à ma quête, qui était une quête de réparation et une rébellion, animées par le sentiment du lien perdu avec le monde vivant, que nous détruisons chaque jour un peu plus, jusqu’à poser nos orteils au bord d’un gouffre dont on n’imagine à peine la profondeur remplie de ténèbres…

« À cette époque, j’ai aussi pris conscience que la nature n’était pas une, mais deux choses bien différentes…

« D’une part, elle est la somme des entités et des lois qui rendent compte de l’évolution et du fonctionnement des systèmes vivants, depuis la cellule jusqu’aux océans. Cette somme est totalisable et appréhendable dans des procédures théoriques, mathématiques et statistiques.

« Mais d’autre part, la nature est aussi une profusion de liens multipolaires, nécessaires et englobants, dont on ne peut s’extraire sans dommage…

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Pour une éco-sémiotique des mondes vivants

L’écologie est par définition une discipline qui franchit les frontières des espèces. Y compris la nôtre. Pour la définir, on adopte ici le cadre de la sémiotique de Peirce. L’écologie est alors un ensemble de savoirs et de pratiques impliquées qui étudient, traitent et échangent les signaux vivants.

L’affirmation fondamentale du pragmatisme de Charles Sanders Peirce tient en trois syllabes : tout est signe. C’est cet axiome – de l’eau pure ontologique – qu’il s’agit de pousser dans ses conséquences pour envisager une science et une éthique des liens vivants dans un univers pluraliste.

L’idée est simple. Il s’agit de considérer que ce qu’on appelle « écosystème » est d’abord et avant tout une toile sémiotique, un réseau de liens et de plis entre des émetteurs-récepteurs qui « parlent » des langages différents et fonctionnent selon des régimes sémiotiques distincts. Pour aller au bout de la logique de Charles Sanders Peirce, il faut ajouter que ces émetteurs-récepteurs sont eux-mêmes des signes (le tac-tac du pic qui attaque le bois du chêne) perçus par les autres, que ceux-ci soient des semblables, des alliés ou des ennemis. Le tissu vivant qui constitue un écosystème est alors la somme non totalisable d’une pluralité de mondes perçus…

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