Leibniz, photographe dans l’âme

Leibniz précurseur de la photographie ? C’est le thème de cette courte réflexion, en marge de la lecture du « Pli » de Gilles Deleuze. Dans un geste monadologique, le moment photographique tente de saisir l’émergence d’une perspective perceptive sur le fond d’un monde tissé de sensations confuses et anonymes.

La conscience se détache comme une zone claire sur le fond sombre de l’âme. Ainsi se formule la conception leibnizienne de la perception dans la monade.

Autour de ce halo intense et net, le perçu se perd progressivement dans le flou et s’abîme dans l’obscurité tendancielle de l’inconscient. Mais justement, c’est là, dans cet évanouissement graduel, que foisonne et insiste le monde. C’est dans ce fond obscur que s’abrite le lien secret et insaisissable entre toutes les individualités qui le peuplent et le composent.

Or, au fond de la monade individuelle, à l’interface de l’âme et du monde, ce sont des myriades de microperceptions qui s’agitent – ces « petites perceptions obscures, confuses », qui appartiennent sans doute aux monades subordonnées de nos organes et cellules. Elles sont la foule des précurseurs sensibles qui se pressent à l’orée de la conscience, peuple anonyme qui à la fois soutient l’objet dans la perception et le retient dans le substrat du monde. Ce peuple si proche, il grouille jusqu’aux confins du réel.

Il y a donc un fond sensationnel microscopique sous la perception macroscopique. Et percevoir dans un monde, c’est toujours réussir ce détachement qui met la perception en lumière et en traits. Voilà le geste du photographe, annoncé par Leibniz un siècle avant la lettre.

Lire la suite

Défaire l’empire des peuples seconds

Par contraste avec les peuples premiers, qui luttent pour la survie de leurs mondes, nous faisons ici le portrait d’un peuple second, qui n’a de cesse de détruire les mondes que cultivent soigneusement les premiers. D’où vient cette faim destructrice ? Et peut-on l’arrêter ? C’est le problème d’écologie et d’anthropologie radicale que nous tentons de poser ici.

Un peu partout dans le monde, nous le savons, il y a – ou il y avait – des « peuples premiers ». Mais il y a aussi des peuples seconds. Ce ne sont pas nécessairement des réalités ethniquement visibles. Rarement des identités pures et étanches. Masi ce sont des structurations systémiques qui s’emparent des sociétés, capturent les terres et les âmes, brisent les corps et disloquent les milieux.

Ces structurations binaires se composent et se recomposent au fil d’histoires agitées, hétéroclites et hybrides, marquées par les grandes essentialités de la civilisation : le pouvoir, le capital (qui est la forme financière du pouvoir) et le colonialisme (qui en est le mode d’expansion). Si on veut, on y ajoutera le patriarcat, forme domestique et coutumière du pouvoir binaire des « seconds » sur les « premiers ».

Lire la suite

Explorez la symbiopshère en 10 livres

Le code du blog symbiosphere, craqué pour vous à travers dix essais qui voyagent entre anthropologie symétrique, philosophie perspectiviste et science des symbioses. + un remerciement.

Lisière ou l’épaisseur du trait ©M_Collette on Foma200

De Pierre Clastres à Anna Tsing, en passant par Deleuze et Guattari, ou encore Lynn Margulis, découvrez les auteur-es et ouvrages pour penser le monde à travers ses relations vivantes. Et poursuivez la réflexion en picorant dans notre liste de 10 articles.

Voir la liste