« Quand j’entends les écologistes décrire le monde, je comprends que personne n’ait envie de le sauver ». Cette phrase, citée de mémoire, a été prononcée par Bruno Latour. Derrière la boutade : une interpellation qui fait vaciller nos certitudes. Ce vacillement est le début de cette réflexion.
Le constat est connu : nous autres, environnementalistes, communiquons bien trop avec notre tête, et pas assez avec nos émotions. Nous parlons aux instruits et aux convaincus, mais nous passons à côté des autres, ceux qui « ne savent pas » ou « ne comprennent pas ». Ce constat, qu’il ne s’agit pas ici de contester, peut d’ailleurs s’appuyer sur les découvertes du cognitivisme linguistique. Résultat : nous nous parlons surtout à nous-mêmes. Nous communiquons entre nous.
C’est pourquoi il est urgent d’interroger les ressources, explicites ou implicites, que nous mobilisons pour penser notre communication. S’appuyer sur une psychologie scientifique ou une théorie neurologique des « biais cognitif » ne peut plus suffire. La raison en est simple : ce type d’approche ne fait que redoubler et renforcer le gouffre que nous devons combler. Entre nous et les autres. Entre ceux qui savent et ceux qui ignorent.
Photo: Emergence hors cadre ©M_Collette sur Ilford Pan 400