Pour une écologie décentralisée. L'art des possibles et la science des symbioses. Twitter : @lower_max – FB: /symbiosphere.blog – LinkedIN : Max Lower ; symbiosphere.blog
De notre indolence hébétée face au désastre climatique à l’extinction de peuples qui ont lié leur destin à celui de leur forêt, courent les ruisseaux mortifères d’un « microfascisme » ordinaire, dont Bolsonaro est une cristallisation politique. Ce dimanche, il pourrait être le fossoyeur de l’Amazonie. Et ce n’est pas un hasard.
« We will spend the rest of our lives watching everything we know and love fall apart. And we are the lucky ones. » Voilà ce que tweetait ce matin une lectrice du Guardian, en écho à un article consacré par le quotidien à un rapport alarmant des Nations unies, faisant état de « l’absence de trajectoire crédible » pour maintenir le réchauffement à 1,5°C.
La question à 2°C (et même à 3°C) – celle qui devrait retenir toute notre attention – est de savoir pourquoi, devant cette chose énorme qui arrive sur nous, nous sommes aussi amorphes et indifférents…
Encore une fois, nous sommes pris en otages. D’un côté, on nous dit que la coupe du monde au Qatar est une folie climatique doublée d’un meurtre de masse. De l’autre, on nous rappelle qu’il s’agit seulement de football et que cela doit être une fête. Une juste conception du mot « hypocrisie » et de son étymologie permet d’envisager un boycott aussi légitime… qu’imparfait.
Géopolitique dans les décombres @M_Collette
Il est facile de hurler à l’hypocrisie, comme l’a fait l’éminent et bruyant président d’un de nos grands partis francophones. Dans une autre démocratie européenne avancée, sa position aurait sans doute été fragilisée après qu’il eut claironné, sur un réseau social, que non seulement il se déplacerait au Qatar, mais aussi qu’il le ferait sans le moindre état d’âme, jugeant que le boycott relève de « la plus crasse hypocrisie » (je cite de mémoire).
Car cet usage accusateur de la notion d’hypocrisie, attribuée à toutes les belles âmes qui s’émeuvent d’une réalité insupportable et inévitable, couvre une manière brutale de s’asseoir sur les dépouilles de 6500 ouvriers-esclaves et sur le climato-négationnisme implicite qui sous-tend cette immense et absurde débauche de béton et de climatisation. Sans même parler de la condition des femmes et des minorités…
La manière dont certaines socialités autochtones résistent à leur destruction ou leur dissolution dans la culture ethnocapitaliste des Blancs éclaire en creux la façon dont leurs mondes sont détruits. Le cas australien, comparé à celui de l’Amazonie, témoigne de différentes approches spatiales et de la manière dont elles se confrontent à la logique d’appropriation-exploitation territoriale.
Lors d’une conférence donnée à Bruxelles ce 8 octobre, l’anthropologue spécialiste de l’Australie Barbara Glowczewski a relaté deux anecdotes qui ont inspiré cette réflexion et serviront à l’introduire et l’illustrer. La première est contenue dans un petit film réalisé par l’anthropologue, qui fut aussi cinéaste. On y voit les membres d’un groupe traditionnel, le corps orné de peintures rituelles, danser et chanter au milieu du désert, en compagnie de plusieurs Blancs. Un texte accompagne l’image, expliquant que ces Aborigènes escortent des émissaires blancs pour leur indiquer un « trou d’eau » sacré qu’ils tiennent à préserver de la destruction et de la pollution. Le texte indique que la compagnie minière qui exploite la région a accepté de laisser intact le sous-sol du site. Happy End provisoire…