À l’âge de la Terre, l’humanité est plate.

Au moment où on reparle d’effondrement, nous tentons de faire le point sur la manière dont le « géocène » affecte la représentation de l’histoire, faisant émerger un retour du refoulé indigène. Pour prêter l’oreille à la possibilité d’une nouvelle polyphonie terrienne.

Photo : Camping Chaos ©Martin_Collette

Pourquoi parler de l’âge de la Terre, du « géocène » ? D’abord parce que ce choix nous évite un malaise, celui que nous infligerait le fait de nous ranger sous la bannière de l’anthropocène et de son narcissisme contrit. Ensuite, et surtout, parce que la notion d’un âge de la Terre prend acte du fait contemporain majeur : désormais, nous sommes « Face à Gaia », pour reprendre le titre d’un livre de Bruno Latour. C’est la Terre elle-même qui répond à nos pires excès et nous inspire nos plus grandes angoisses, qui impose son tempo, bien trop lent pour nos frénésies économiques, qui met un terme brutal à nos rêves de grandeur et de progrès. Le désastre où nous avançons n’est pas une énième réalisation de l’Homo faber (anthropocène) ni l’accomplissement sinistre de sa domination (capitalocène). Mais la réaction exaspérée de tout ce qui nous avait semblé négligeable, malléable, mobilisable. L’âge où la Terre a cessé d’être indifférente à notre indifférence.

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Les chemins du Rêve

PETITE RéFLEXION sur LES RACINES écologiques du totémisme

Dans cet article, je poursuis mes recherches sur la constitution d’espaces terriens partagés, que je confronte ici à la lecture des textes de Philippe Descola. Il en résulte un exercice de redéfinition du totémisme, envisagé d’après son origine éco-topologique.

Convolution ©Martin_Collette

Je ne suis pas ethnologue. Je traite le sujet du totémisme en amateur, sous l’angle de mes réflexions transdisciplinaires sur la constitution des « anthropospaces », c’est-à-dire les manières dont les humains se figurent l’espace terrestre et comment ils le partagent avec d’autres vivants. Autant dire que je ne cherche en rien à polémiquer sur la pertinence ou la légitimité du concept ethnographique de « totem », ni sur le sens de l’approche ethnologique en général. Seuls m’intéressent les témoignages de la variété écosophique des conceptions, récits et pratiques qui relient les humains à leur environnement vivant. L’objectif demeure l’établissement de « transversalités planétaires » permettant de mutualiser des ressources pragmatiques indigènes pour « résister au désastre »…

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